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La Semaine de Buvette
7 novembre 2006

Contes de notre enfance - refaits à neuf (3) : une âme errante.

Quand elles arrivent devant le grand tribunal de l’éternité, les âmes sont pesées puis jugées, enfin elles prennent le chemin de leur destination pour l’éternité, conduites par leurs nouveaux gardiens. Dans cette grande machinerie céleste il arrive quelquefois que se glisse un grain de sable. Ainsi, un jour les démons revinrent au grand tribunal une âme à la main et ils expliquèrent qu’elle était bien trop pure pour résider aux enfers. Alors ils la transmirent aux anges mais le court séjour qu’elle avait fait en enfer l’avait corrompue. Nul n’en voulant, il fut décidé qu’on la renverrait sur terre pour la juger à nouveau à sa prochaine mort.

 C’est ainsi que l’âme repartit parmi les hommes, transportant son propre enfer.

 Ce matin-là elle sortit seule du hall. Pendant dix mois, le hall avait été l’ultime frontière et ce matin-là elle avait eu officiellement l’autorisation de la passer et de regagner le monde des vivants. Elle passa seule le hall et se retrouva dehors seule également, plus seule qu’elle ne s’était jamais sentie. Libre aussi, beaucoup trop libre. Elle venait en quelques secondes de laisser derrière elle son environnement familier, les couloirs blancs, les chambres toutes identiques dont la serrure ne pouvaient se fermer que de l’extérieur.

 Elle redevint l’étrangère qu’elle se sentait déjà avant, mais on lui avait appris à se cacher.

 En deçà de la frontière on lui avait appris comment se comporter dans le monde des vivants. On lui avait dit les comportements acceptables, les réactions qu’il fallait museler, on lui avait apprit les bienséances et les mots à ne laisser vivre qu’en privé. Elle alla payer son billet de train et nul ne remarqua rien, ni quand elle fit le voyage en seconde classe. Elle voyageait parmi les hommes sans qu’ils la remarquent, elle espérait en regardant par la fenêtre défiler les paysages que celui qu’elle retournait hanter la verrait.

 Elle sonna, l’homme ouvrit et eut l’air surpris. Ils ne s’étaient pas donné de nouvelles depuis si longtemps après leur solide intimité. Leurs regards ne se croisèrent que brièvement, il baissa les yeux le premier comme un signe de sa mauvaise conscience. Il y avait sur un buffet un portrait qui n’était pas le sien. Elle avait appris qu’elle avait en elle trop de colère, qu’il fallait la maîtriser. Elle avait appris qu’il fallait combattre l’amertume et ne donner que de l’amour.

 Alors elle donna de l’amour, comme on lui avait appris, et tandis qu’elle se tenait à genoux devant lui, ouvrant sa braguette, l’homme fit semblant de ne pas voir qu’elle pleurait.

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Commentaires
B
C'est triste comme histoire de buvette !
B
P-H > Ah ben bravo la substilité hein...<br /> <br /> Cécile > oui on va dire ça. T'es fine comme fille des fois hein ?<br /> <br /> Marietoune > Aucune métaphore. Juste une histoire. Qui pourrait arriver, qui est peut-être arrivée, qui arrivera peut-être, va savoir...
M
Métaphore mais de quoi?
C
tu as raison, on va dire deduction plutot qu'imagination. <br /> .
P
Un calumet de la paix ?
La Semaine de Buvette
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